Une question assez récurrente nous est souvent posée : Pourquoi n’êtes-vous pas Bonapartistes ? Ou tout au moins, pourquoi en tant que Royalistes ne défendons-nous pas la politique de Napoléon Bonaparte face à la révolution ? Sans oublier tous les petits idolâtres du petit corse qui grognent sur nos vidéos chaque fois que l’on formule une critique sur leur idole…
Nous allons donc nous efforcer dans cet exposé de répondre à cette question en faisant un bilan global de l’œuvre de Napoléon expliquant pourquoi, en tant que Royalistes, nous ne pouvons défendre un tel personnage et son idéologie.
Pour commencer, l’une des raisons la plus évidente à nos yeux, et qui justifie amplement notre rejet du bonapartisme, c’est que ce dernier est avant tout un héritier de la révolution de 1789. Napoléon, au même titre que Robespierre ou Marat ou bien d’autres encore, est un fils de 1789. Il est la branche militaire et impérialiste des idéaux de la révolution antifrançaise.
Le chanoine Henri Delassus l’exprimait en ces termes :
« De fait, partout où Napoléon porta ses armes, il y faisait ce qui avait été fait en France, établissant l’égalité des cultes, expulsant les religieux, vendant les biens ecclésiastiques, imposant le partage forcé, abolissant les corporations, détruisant les libertés locales, renversant les dynasties nationales, anéantissant en un mot l’ancien ordre des choses et s’efforçant de substituer à la civilisation chrétienne une civilisation dont les dogmes révolutionnaires auraient été le fondement et le principe. »
Cité par Jean Ousset, dans : Pour qu’il règne, 1986 – p. 229
Mieux encore, cette fois-ci de la part de son cher neveu, le futur Napoléon III du second empire, ne disant pas mieux dans ses idées napoléoniennes :
« Napoléon, en arrivant sur la scène du monde, vit que son rôle était d’être l’exécuteur testamentaire de la révolution. Le feu destructeur des partis était éteint, et lorsque la révolution mourante mais non vaincue légua à Napoléon l’accomplissement de ses dernières volontés, elle dut lui dire : « Affermis sur des bases solides les principaux résultats de mes efforts, réunis les Français divisés, repousse l’Europe féodale liguée contre moi, cicatrise mes plaies, éclaire les nations, exécute en étendue ce que j’ai dû faire en profondeur ; sois pour l’Europe ce que j’ai été pour la France; et quand même tu devrais de ton sang arroser l’arbre de la civilisation, voir tes projets méconnus et les tiens sans patrie errer dans le monde, n’abandonne jamais la cause sacrée du peuple français, et fais-la triompher par tous les moyens que le génie enfante, que l’humanité approuve. » »
Des idées napoléoniennes – par Louis-Napoléon Bonaparte – Paulin Librairie éditeur – 1839 p17 et 18
Oui, Napoléon fut bel et bien le fer de lance et le bras armée des idéaux de la révolution !
D’ailleurs, le 5 octobre 1795, suite à l’échec du débarquement de Quiberon et du vote du Décret des deux tiers, une insurrection royaliste éclata à Paris. Forts de plus de 20 000 hommes commandés par le Général de brigade Louis Thévenet, les Royalistes arrivèrent à cerner la Convention. Mais la répression de cette dernière fut sans pitié. Et c’est Napoléon qui, sur ordre du général Paul Barras, s’attela à cette sanglante tâche. En infériorité numérique par rapport aux Royalistes, c’est donc à grand coup de canon qu’il réprima l’insurrection. Après trois quart d’heures de canonnade devant le parvis de l’Eglise Saint Roch, rue Saint Honoré, le bilan fut de 300 morts parmi les Royalistes. Les autres, blessés pour la plupart, prendront la fuite… Bonaparte venait de sauver la Convention et à travers elle la république ! Pour cet épisode qui lui valut ensuite le grade de général de division et le commandement en chef de l’armée de l’Intérieur, en tant que Royalistes, nous ne pouvons que nous détourner d’un tel personnage…
Après le coup d’État du 18 Brumaire instaurant le consulat, le futur Louis XVIII, alors en exil, écrivit à Bonaparte pour lui demander de restaurer la monarchie légitime. Bonaparte lui fit cette réponse tardive : « Vous ne devez pas souhaiter votre retour en France, il vous faudrait marcher sur 100 000 cadavres… Sacrifiez votre intérêt au repos et au bonheur de la France. L’histoire vous en tiendra compte. » On appréciera le mépris de Napoléon envers les Bourbons et la Monarchie, comme sa considération du « bonheur de la France », les milliers de morts doivent se retourner dans leurs tombes ! D’autant plus que l’intérêt du prince se confond avec celui de la France. L’assassinat de Louis XVI en est la preuve la plus flagrante. Louis XVIII n’eut donc pas à marcher sur 100 000 cadavres pour accéder au Trône légitime, mais dû attendre 1814 et près d’1 millions de français et alliés morts des conséquences des guerres napoléoniennes de 1803 à 1815 ! Si seulement Napoléon avait su sacrifier son intérêt au repos et au bonheur de la France en rétablissant la Monarchie légitime à temps, comme le préconisait le futur Louis XVIII, l’histoire aurait su lui en tenir compte… L’arrivée de Louis XVIII fut considérée globalement comme un soulagement car pour l’époque, le Roi c’était la paix ! Il sut libérer la France de l’invasion qu’elle subissait conséquemment aux guerres napoléoniennes, et redonna aux pays envahis leurs frontières légitimes d’avant l’Empire.
Chateaubriand exprima ce soulagement en ces termes :
« Le premier service que l’héritier des fleurs de lis rendit à sa patrie, fut de la dégager de l’invasion européenne. La capitale de la France n’avait jamais été conquise sous la race légitime, Buonaparte avait amené les étrangers dans Paris avec son épée ; Louis XVIII, les en écarta avec son sceptre. »
Chateaubriand « Le roi est mort, vive le roi ! » p15
Comme nous l’avons vu, Napoléon avait menacé le Comte de Provence de 100 000 morts s’il revenait en France, alors que son règne coûta la vie de près d’1 millions d’hommes qu’il aurait pu épargner si son ambition avait été la gloire de la France et non la sienne ! D’ailleurs au soir de la bataille d’Eylau (8 février 1807), devant les nombreux cadavres qu’engendra le carnage que fut cette bataille, Napoléon aurait prononcé cette phrase assez cynique : « Une nuit de Paris réparera tout cela… » Nous sommes loin d’un Louis XV qui, devant les morts de la bataille de Fontenoy en 1745, enseignait à son fils : « Voyez tout le sang que coûte un triomphe. Le sang de nos ennemis est toujours le sang des hommes. La vraie gloire, c’est de l’épargner». Mais n’est pas Roi qui veut…
Socialement, Napoléon resta dans la lignée du libéralisme économique institué en France par Isaac le Chapelier et Pierre d’Allarde. Ces deux derniers abolirent en 1791 les corporations de métiers, qui étaient des communautés de métiers protectrices des travailleurs, pour les remplacer par un régime libéral rendant totalement impuissants les ouvriers face à la toute-puissance de la bourgeoisie d’affaire voltairienne. Face à cette prolétarisation du monde ouvrier, Napoléon aurait pu leur redonner leur dignité comme avait su le faire Louis XVI face à Turgot en rétablissant le régime corporatif. Mais en digne héritier des idéaux révolutionnaires, il n’en fit rien et au contraire, en 1803, il institua le Livret ouvrier, afin de restreindre la libre circulation des ouvriers en France.
Tout ouvrier voyageant sans livret était réputé vagabond et condamné comme tel. Il ne pouvait quitter un employeur qu’après que celui-ci eut signé un quitus sur le livret, la signature devant être certifiée par une autorité, et ne peut quitter une commune sans le visa du Maire ou de la Gendarmerie, avec indication du lieu de destination.
L’employeur doit inscrire sur le livret la date d’entrée dans l’entreprise puis la date de sortie, et indiquer que l’ouvrier le quitte libre de tout engagement.
La perte du Livret interdit de travailler et de quitter la commune du dernier domicile, jusqu’à obtention d’un nouveau livret. Voilà l’un des aspects du p’tit empereur qui va parfaitement à l’encontre de la doctrine sociale royaliste.
Le 30 avril 1803, les Etats-Unis achetèrent à la France pour 80 millions de francs, soit 15 millions de dollars, les territoires de la Louisiane, qui avaient été repris à l’Espagne en 1800 par le Traité de San Ildefonso.
Napoléon Bonaparte, alors 1er Consul, comptait sur cet argent pour financer sa guerre contre l’Angleterre. Le traité fut signé à Paris sans consultation de l’Assemblée nationale, qui aurait pu refuser une telle perte pour la France, et en toute illégalité au regard du Traité de San Ildefonso qui stipulait l’interdiction de revendre le territoire de la Louisiane.
Le grand gagnant de cette affaire fut le président américain Thomas Jefferson. Grâce à l’abandon de la Louisiane par Napoléon, les américains doublèrent la superficie de leur pays, ouvrant ainsi la voie à une expansion inexorable dont souffriront encore plus cruellement les Amérindiens. Le territoire vendu dépassait les 2 millions de km2 soit environ 1/4 du territoire américain actuel !
On imagine largement l’influence durable que la France aurait pu avoir sur ce territoire en Amérique si Napoléon ne l’avait pas stupidement bradé pour financer ses guerres impériales inutiles… Il est souvent reproché à Louis XV le traité de Paris de 1763 abandonnant une grande partie des territoires de la Nouvelle France. Erreur certes fort regrettable, et qui fut largement inspirée par un Voltaire pour qui ces colonies ne représentaient que « quelques arpents de neige ». Mais alors que le Traité de San Ildefonso nous avait laissé une seconde chance de sceller durablement notre influence en Amérique, Napoléon, pourtant grand stratège militaire, n’a pas su évaluer correctement les conséquences d’une telle perte… Il se débarrassa donc à son tour de ce vaste territoire qui, s’il l’avait gardé, aurait largement changé le court de notre histoire durant tout le XIXè et XXè siècle… L’hégémonie américaine anglo-saxonne que nous subissons à ce jour en est une conséquence et ne parlons pas de la langue Française…
Un autre épisode fort peu glorieux du petit empereur : l’assassinat du duc d’Enghien. Même si on peut comprendre l’exaspération de Napoléon face à tous ces complots et attentats royalistes qu’il subissait depuis un certain temps déjà, il n’en demeure pas moins que sa réaction pour tenter de calmer les Royalistes fut une honte absolue. Basé sur des bruits qui couraient et un mauvais renseignement, il accusa à tors le duc d’Enghien d’être un des principaux instigateurs de tous ces complots contre lui. Ce qui était totalement faux. Il fit donc enlever ce prince de sang, cousin lointain de Louis XVI, le 15 mars 1804 à Ettenheim en Allemagne, là où il résidait à environ 10 km de la frontière française. Après un bref passage à Strasbourg, le Duc fut transféré directement à Vincennes. Là-bas il y subit un simulacre de procès, digne de ceux de l’époque de la terreur. Et sans qu’il y ait eu une seule preuve apportée contre lui, selon la volonté de Napoléon lui-même, il sera néanmoins condamné à mort et fusillé la nuit du 21 mars 1804, dans les fossés du château de Vincennes à la lueur d’une simple lanterne.
Faisons ici une parenthèse, comme nous l’avons fait en comparant l’humanisme d’un louis XV et de Napoléon sur le champ de bataille envers le sang des hommes. Là c’est un noble et un parvenu qui se font face et même si ce dialogue n’eut pas lieu, il montre bien la différence entre les hommes de deux sociétés. Dans le téléfilm « Les Fossés de Vincennes », on comprend la tâche essentielle de l’ordre chevaleresque nobiliaire de mourir aux frontières pour protéger la nation. La réplique est attribuée au Duc d’Enghien, Prince de Condé âgé alors de 32 ans faisait face au tribunal militaire qui allait le fusiller sur l’ordre de Napoléon, écoutons :
« le militaire: J’ai servi de la limonade, autrefois citoyen et j’étais de ceux qui ont pris la Bastille...
Condé: Croyez-moi, cher Monsieur que je ne vois nulle honte à servir de la limonade. Quant au fait d’armes que semble être pour vous la prise de la Bastille, n’attendez pas que je vous en félicite…
le militaire: J’étais à Lodi et à Castiglione, citoyen, ,j’étais à Rivoli, Gènes, Marengo, citoyen...
Condé: Mes ancêtres étaient à Ravenne et à Marignan, Monsieur, le Grand Condé s’appelait d’Enghien à Rocroi, était à Spire, à Fribourg, à Worms, à Landau, à Mayence, à Nortingen.
Mon Grand-Père était à Johannesberg. Mon Père Louis Joseph de Condé à Gibraltar et à Minden. Ma Famille se bat depuis quatre siècles pour la France Monsieur... »
21 mars 1804, c’est la date de l’assassinat honteux du duc d’Enghien, mais c’est aussi la date de promulgation du fameux Code Civil de Napoléon ! Ce Code Napoléon a toujours été loin de faire l’unanimité. Des personnalités différentes comme Proudhon, Balzac, Renan, Jules Guesde, Jaurès ou Maurras, ont été très critiques à l’égard de ce Code. Et pour cause, en matière de succession, le Code Civil imposa un partage forcé et égalitaire qui ne fut pas sans conséquences. Napoléon exprimait lui-même ces conséquences en ces termes :
« Établissez le Code civil à Naples ; tout ce qui ne vous est pas attaché va se détruire alors en peu d’années, et ce que vous voulez conserver se consolidera. Voilà le grand avantage du Code civil. Il faut établir le Code civil chez vous ; il consolide votre puissance, puisque, par lui, tout ce qui n’est pas fidéicommis tombe, et qu’il ne reste plus de grandes maisons que celles que vous érigez en fiefs. C’est ce qui m’a fait prêcher un Code civil, et m’a porté à rétablir. » (Lettre, du 5 juin 1806, de Napoléon Ier au roi Joseph – Mémoires du roi Joseph, t. II, p. 275 ; Paris, 1853.)
La conséquence étant le morcellement des héritages comme la baisse de la natalité, avec pour finalité une forte augmentation des conflits familiaux. L’historien Pierre Bécat dans son « Napoléon et le destin de l’Europe » disait : « Partisan, d’une part, de l’inviolabilité de la propriété foncière, Bonaparte la démantelait d’autre part avec le partage forcé et égalitaire, assorti de taxes successorales qui aboutissent à l’anéantissement d’un patrimoine tous les vingt-cinq ans. » (Pierre Bécat – « Napoléon et le destin de l’Europe » Editions Arts et Voyages (1969) – p95)
C’est également dans ce même Code Civil que l’on apprend ce qu’est une femme ! A savoir : « un être de second rang si elle n’est pas mariée, un être mineur et incapable si elle est mariée. Nuls droits politiques ou civils ne lui sont accordés. » Voilà qui donne le ton, et qui trahi parfaitement bien l’esprit Napoléonien, en parfait accord avec celui des philosophes des Lumières, comme Jean-Jacques Rousseau pour ce qui est de la considération de la femme… Mais d’aucuns vous diront que le siècle des Lumières, est avant tout un siècle de progrès… Le Code Civil est infesté de citations du même genre, justifiant ainsi tous les combats que mèneront les femmes durant le XIXe et XXe siècle, pour se libérer d’une telle considération et retrouver leur dignité !
Certains nous disent aussi que nous devrions apprécier au minimum Napoléon pour le Concorda ! Oui, il est vrai qu’en apparence, Napoléon fit preuve d’un certain respect vis-à-vis de la religion catholique. Mais en apparence seulement. Car de son propre aveux, la religion catholique n’était pour lui qu’un simple outil de domination afin d’asseoir et renforcer encore un peu plus son pouvoir et son contrôle sur les peuples dominés. Voici comment il s’exprima sur ce sujet dans « Le Mémorial de Sainte-Hélène » :
« Avec le catholicisme j’arrivais bien plus aisément à tous mes grands résultats… Au dehors le catholicisme me conservait le Pape ; et avec mon influence et mes forces en Italie, je ne désespérais pas tôt ou tard, par un moyen ou par un autre, de finir par avoir à moi la direction du Pape, et dès lors, quelle influence ! Quel levier d’opinion sur le reste du monde ! »
« Il me faut le vrai Pape catholique, apostolique et romain, celui qui siège au Vatican. Avec les armées françaises et des égards, j’en serai toujours suffisamment le maître. Quand je relèverai les autels, quand je protègerai les prêtres, quand je les nourrirai et les traiterai comme les ministres de la religion méritent de l’être en tous pays, il fera ce que je lui demanderai… Il calmera les esprits, les réunira sous sa main et les placera sous la mienne. » (Mémorial de Sainte-Hélène – par Emmanuel de Las Cases – Ernest Bourdin Editeur – Tome 2- (1842) p113)
Voilà en fait ce qui se cachait réellement derrière le Concorda ! Une simple manipulation politique afin d’asseoir sa domination et renforcer son pouvoir !
Et il allait encore plus loin dans ses délires avec son « Catéchisme à l’usage de toutes les Eglises de l’Empire français ». Dans ce catéchisme on pouvait y lire : « Honorer et servir notre empereur est donc honorer et servir Dieu même. » Rien que ça ! Même à l’époque de la Monarchie, les Rois n’étaient que les Lieutenants du Christ sur terre, et certainement pas Dieu lui-même ! Jeanne d’Arc avait su le rappeler en son temps avec la Triple Donation. D’autant plus que lors de son simulacre de sacre à la cathédrale de Notre Dame de Paris, il se couronna lui-même, et non le pape ! Et voici la réponse qui était formulée dans ce catéchisme à cette question :
- « Que doit-on penser de ceux qui manqueraient à leur devoir envers notre empereur ? »
- « Selon l’apôtre saint Paul ils résisteraient à l’ordre établi de Dieu même, et se rendraient dignes de la damnation éternelle. » (« Catéchisme à l’usage de toutes les Eglises de l’Empire français » 1806 – p59)
Nos âmes sont vouées à la damnation si on s’oppose à l’Empereur ? Rien que ça ! Même Louis XIV pourtant si imbu de sa personne n’aurait pas osé…
De plus, parce que le Pape Pie VII avait refusé d’adhérer au blocus continental contre l’Angleterre orchestré par Napoléon, ce dernier, en représailles, car n’acceptant pas un tel refus, fit enlever le Pape par le général Radet dans la nuit du 5 au 6 juillet 1809. Pie VII fut d’abord détenu à Savone (1809-1812), puis à Fontainebleau (1812-1814). Traité en prisonnier d’État, le Pape Pie VII dû attendre l’affaiblissement du pouvoir Napoléonien pour pouvoir rentrer triomphalement à Rome le 24 mai 1814. Il en va de même pour Louis XVIII et son retour en France. Une telle attitude de la part de Napoléon ne peut que susciter du mépris de la part de tous les Catholiques dignes de ce nom !
Il est vrai que Napoléon voulu incarner cette synthèse entre l’Ancien régime, dont il singea le sacre, et la révolution. D’ailleurs dans sa lettre à son frère Louis du 21 décembre 1809, il le mit en évidence en ces termes : « …depuis Clovis jusqu’au comité de salut public, je me tiens solidaire de tout… » Là fut son erreur, car au final on ne mélange jamais les torchons avec les serviettes, c’était soi l’un ou l’autre, car les idéaux de la révolution n’ont jamais été compatibles avec ceux de la France catholique traditionnelle et multiséculaire, expliquant de ce fait l’hostilité constante des républiques envers la religion, l’histoire et la culture Française. Attitude toujours observable à ce jour.
Quoi qu’il en soi, parce qu’il est l’héritier des idéaux néfastes de la révolution, parce qu’il méprise la religion catholique en se prenant pour Dieu, et traitant le Pape comme un prisonnier et un simple outil pour sa gloire. Parce qu’il a sauvé la Convention et la république en 1795, en massacrant à grand coup de canons des Royalistes venus sauver la France. Parce qu’il a accentué la prolétarisation du monde ouvrier avec son Livret ouvrier afin de limiter au maximum les libertés des travailleurs. Parce qu’il a refusé le rétablissement de la Monarchie, comme le lui avait préconisé le futur Louis XVIII en menaçant ce dernier de 100 000 cadavres s’il revenait en France. Et qu’au lieu de ces 100 000 cadavres ce fut près d’1 millions de morts pour servir sa gloire et ses conquêtes européennes visant à mieux diffuser dans le monde la pensée révolutionnaire. Conquête qui se soldera au final par l’invasion de la France… Parce qu’il a abandonné de façon frauduleuse et irresponsable les 1/4 du territoire américain que possédait la France depuis le traité d’Ildefonso. Ces territoires étaient une seconde chance depuis la défaite de Louis XV, et qui aurait pu accroître et sceller durablement notre influence dans le monde. Parce qu’il a ordonné la honteuse exécution du duc d’Enghien pour des raisons fallacieuses. Parce qu’il a imposé son fameux Code Civil instituant un statut honteux pour les femmes, et détruisant un peu plus chaque jour les héritages. Et nous pourrions aussi rajouter ses fameuses « Maries-Louises », jeunes recrues de 1814 qui étaient pour la plupart totalement inexpérimentés à la guerre. C’était une sorte de recrutement du désespoir face à la chute inéluctable de son empire. Anatole France avait décrit ces « Maries-Louises » en ces termes :
« Pour défendre son sol envahi, la France épuisée donne ses derniers enfants, de pauvres paysans très jeunes, presque tous mariés, arrachés douloureusement à leur maison, à leur femme, à l’humble douceur du champ natal. On les appelait des Maries-Louises. Les Maries-Louises furent sublimes. Ils ne savaient pas monter à cheval et le général Delort disait d’eux : « Je crois qu’on perd la tête de me faire charger avec de la cavalerie pareille. » » (Anatole France – « La Vie littéraire » Volume 2e série – Edition Calmann-Lévy – 1921 – p182)
Pour toute ces raisons-là, nous ne pouvons, en tant que Royalistes, être, ni adhérer au Bonapartisme. Même si nous admettons qu’il y eu des choses positives chez Napoléon, nous reconnaissons aisément son génie militaire, ce génie appuyé des anciennes armées du Roi ayant libérées l’Amérique, possédant les dernières nouveautés en armes, le mousquet 1777 et le canon Gribeauval et en regrettant la destruction de l’excellente flotte qu’avait laissé Louis XVI ! Même nous pouvons imaginer ce qu’aurait pu être la France avec Napoléon comme Chef des armées au service du Roi Louis XVI ! Mais la révolution de 1789 décida d’un sort beaucoup moins glorieux pour la France… Et nous reconnaissons aussi la capacité qu’eut Bonaparte à sortir justement la France du chaos révolutionnaire, en lui donnant une meilleure stabilité politique. Mais malheureusement ce fut pour mieux diffuser les idéaux de la révolution dans le monde avec ses conquêtes européennes… Sans oublier sa fameuse expédition en Egypte qui permis de faire découvrir à l’Europe et au Monde la très grande et énigmatique civilisation Egyptienne antique, un peu dans le même esprit qu’un Louis XVI et l’expédition de Lapérouse…
Mais au final, on ne peut considérer le bonapartisme comme une valeur sûre. Héritier des idéaux de la révolution, le ver est dans le fruit !
Et le côté va-t-en-guerre des Bonaparte n’est pas non plus l’aspect le plus réjouissant de l’impérialisme de cette pensée politique. Que ce soit avec Napoléon 1er ou son neveu Napoléon III, dans les deux cas leur règne s’acheva par l’invasion de la France ! Pour Napoléon III ça sera même pire car la défaite de la guerre de 1870 eut pour effet de sceller durablement la république en France, et avec elle, l’esprit revanchard qui ouvrira la voie aux désastreux conflits mondiaux du XXe siècle face à une Allemagne totalement réunifiée depuis Bismarck…
Bref, quoi qu’il en soi, pour nous Royalistes, notre considération de la France est celle que l’histoire nous enseigne et nous préférons honorer un Cadoudal, personnage hautement politique, qui avait bien compris en son temps le coté néfaste de l’empire ! notre chemin sera celui des libertés et non celui d’un quelconque enrégimentement de la Nation, dont on sait l’issue. Cette libération sera celle des participations populaires, communautaires, corporatives. Le tout au sein d’une Monarchie sociale au pouvoir décentralisé et fédérative des provinces autonomes, des métiers librement organisés, et des familles unies.
La place du bonapartisme dans tout ça se trouve dans la longue liste des erreurs à combattre !
Nous clôturerons ainsi en citant Napoléon lui-même : « Il y a plus de chances de rencontrer un bon souverain par l’hérédité que par l’élection. »
Là-dessus, nous sommes totalement d’accord !
Notre jour viendra !
P-P Blancher et Frédéric Winkler