La Question Sociale et la précarité de l’emploi

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A l’heure où le thème de la précarité de l’emploi semble devoir quotidiennement revenir sur le devant de la scène médiatique, il est bon de relire ces quelques termes, tirés de l’ABC du Royalisme Social de Firmin Bacconnier :

« Qu’est-ce qu’un prolétaire ?
Un individu proclamé libre par la loi, mais dont le droit à la vie n’est, pratiquement, fondé sur aucun titre juridique, pour ce motif qu’il ne possède que sa chair. C’est un exproprié ; s’il veut vivre, il doit, chaque jour, vendre ses membres ou son cerveau au prix fixé par la seule autorité patronale, qui garde la faculté de lui retirer quand il lui plaît ses moyens de subsistance. […] Tel est l’état du travailleur sous le régime institué en 1791 par la Révolution. »

Quelle actualité ! Quelle permanence dans ces propos pourtant écrits voilà près d’un siècle ! Car voilà la grande conclusion qui saute immédiatement aux yeux : les prétendues avancées modernes dans le domaine de la protection de l’ouvrier ne sont en fait que d’immenses chimères voilant l’intrinsèque incompétence républicaine.
Comment expliquer autrement l’explosion du nombre d’emplois précaires (CDD, Intérims entre autres) ces dix dernières années ? En 2005, l’ensemble des emplois précaires représentait près de 21 % de la population active, et force est de constater le renforcement de ce chiffre par la crise systémique que traverse actuellement notre pays. Entre 2000 et 2010, les CDD de moins d’un mois ont augmenté de près de 88% : en 2011, près de 81% des embauches françaises se font en CDD, contre 73% en 1999 (On pourra d’ailleurs relire à propos le Rapport Gallois sur ce sujet).
L’évidente détérioration de la situation de l’emploi en France, corroborée par l’inéluctable croissance du nombre de demandeurs d’emplois, laisse planer le doute sur la pertinence des propositions gouvernementales… L’absurde exécration socialiste du patronat, qui se traduit économiquement par un véritable étau fiscal pesant sur les entreprises (65% de taxes en 2011 sur les PME), ne résout absolument pas l’affaire. Pire, elle catalyse l’actuelle crise sociale en montant les différentes classes les unes contre les autres.
Face à ce récurrent problème de la précarité de l’emploi, l’Histoire apporte, pour qui veut bien lui accorder son attention, quelques belles leçons pour notre époque. Ainsi, sous l’Ancien Régime, si la sécurité de l’emploi n’était évidemment pas parfaite, la mise en place de patrimoine au sein même des corporations permettait un soutien constant et inébranlable de celle-ci à ses membres pendant les temps plus difficiles. Comme l’écrit Pierre Chamboche dans son article la Sécurité de l’Emploi :
« A Toulouse, si un confrère ménétrier devenait malade et manquait de ressources, les bayles de la communauté devaient lui venir en aide sur les deniers de la caisse ; tombait-il en faillite et la pauvreté l’empêchait-elle de payer sa dette, on lui faisait sur la même caisse l’avance nécessaire pour l’éteindre, à condition de la restituer dans un temps plus prospère…… »

Aujourd’hui, l’Etat français, s’inspirant des systèmes beveridgiens et bismarckiens, se targue de pouvoir subvenir (à crédit) aux besoins de chaque français par un système d’assistance sociale « équitable ». Chimère évidente : imposée de manière stupidement uniforme à toutes les professions, elle catalyse l’assistanat et inhibe toute réelle émancipation du citoyen, sans résoudre de quelque manière que ce soit l’équation économique.

Dans son texte l’Organisation Sociale selon La Tour du Pin, Roger Sémillon écrivait :
« Quand le travail est honoré, on lui reconnaît un droit, il s’organise, la corporation professionnelle fleurit et avec elle l’apprentissage « qui conserve l’acquit de la veille et prépare le perfectionnement du lendemain », la production est réglée de manière à suffire aux besoins de la population sans les dépasser. Ainsi le métier devient « une propriété d’un rapport assuré » et la famille, comme la cité, est stable.
Dans le régime moderne, dit de la liberté du travail, le travail n’étant pas organisé, l’individu est à la merci des fluctuations du marché, dues aux jeux du capitalisme; il est désarmé contre les accidents de sa propre existence et rien n’est moins assuré que la subsistance de sa famille. Pour l’ouvrier, notamment, le régime de la liberté du travail est celui de la liberté de mourir de faim. »

L’actuelle problématique de la précarité trouve son fondement dans ce régime de liberté du travail qui, joint à la loi d’assistanat de la république, empêche littéralement toute réelle amélioration de cette triste situation. Ainsi, les conservateurs sociaux auront à cœur d’opposer les lois de prévoyance aux lois d’assistanat, l’association professionnelle à l’individualisme social, l’économie naturelle à la chrématistique commerciale : donnons aux ouvriers français cette sécurité de l’emploi qui, par la faute d’institutions profondément inhumaines et antisociales, leur fait aujourd’hui tant défaut…

Augustin DEBACKER

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