Les Royalistes contre les délocalisations

Délocalisations : l’hypocrisie des élus socialistes :

La décision du Syndicat des transports d’Ile-de-France de confier son contrat de plate-forme téléphonique à une société basée au Maroc a montré les contradictions, voire peut-être pire, de socialistes qui, désormais, cumulent tous les pouvoirs politiques, exécutif comme législatif, de l’Etat aux régions, et n’ont plus l’excuse d’un gouvernement de Droite qui pourrait les gêner…

C’est aussi la démonstration que cette Gauche-là a les mêmes fondements idéologiques sur le plan économique que la Droite libérale précédemment au pouvoir : ce qui leur importe, à l’une comme à l’autre, ce n’est pas exactement la qualité du service ou le maintien de services publics locaux ou nationaux, mais bien la rentabilité, voire la profitabilité dans le sens le plus capitaliste du terme. Après tout, ce n’est pas une opinion forcément condamnable mais c’est une idéologie néfaste, en particulier pour ceux qui travaillent mais aussi pour l’environnement, les uns et l’autre étant ainsi trop facilement sacrifiés à des intérêts financiers et à cet alibi fourre-tout de la lutte contre les déficits…

Bien sûr, ceux-ci existent et posent problème mais leur nécessaire réduction ne doit pas se faire au détriment des intérêts sociaux, nationaux et environnementaux. L’argument principal du président socialiste de la région d’Ile-de-France, M. Huchon, est celui du « strict respect du Code des marchés publics », consolidé par celui de « l’offre la mieux disante », c’est-à-dire la moins coûteuse : il est vrai que l’offre du prestataire basé au Maroc est alléchante puisque le coût du travail horaire y est moitié moins élevé qu’en France et que la flexibilité des horaires y est maximale, avec un minimum de droits syndicaux et sociaux…

Affiche contre delocalisations petit

« L’offre la mieux disante », selon l’expression employée par M. Jean-Paul Huchon, est donc celle qui, en définitive, est « la moins disante » sur le plan strictement social et évidemment sur le plan national et local ! Car, en définitive, cette décision menace 80 emplois en France, au moment même où le chômage explose littéralement et que certains annoncent 180.000 chômeurs de plus d’ici l’hiver prochain ! La réaction, justifiée, du ministre du Redressement productif, M. Montebourg, d’en appeler à reconsidérer cette décision, est fortement critiquée au sein même du Parti socialiste et paraît peu soutenue par le président François Hollande qui explique doctement qu’il n’est « pas favorable à une surenchère protectionniste » même s’il en appelle (cela ne mange pas de pain…) à l’attention des responsables publics sur la question de l’emploi en France…

https://soundcloud.com/user5994089/les-royalistes-contre-les-d

Ainsi, si je comprends bien l’actuel président, le fait de préférer sauvegarder des emplois en France plutôt que de contredire les règles d’un libre-échange rendues encore plus inégales par la mondialisation, serait la marque d’un « protectionnisme » visiblement considéré comme un « mal absolu » par ceux qui nous gouvernent… Alors qu’il aurait fallu rappeler la volonté du politique de ne pas laisser l’économique détruire l’équité sociale, M. Hollande, à rebours de ce que n’avait pas hésité à faire Outre-Atlantique Franklin Delano Roosevelt, préfère rester dans une logique qui privilégie l’Argent à l’Humain…

D’ailleurs, dans la rage de déconstruction législative qui a agité la majorité socialiste au mois de juillet, certains aspects les plus condamnables de la politique sarkozienne ont été étrangement préservés, en particulier sur l’ouverture dominicale des grands magasins, et il n’y a même pas eu d’annonce sur ce sujet pourtant important…

Il faudra pourtant bien rouvrir le débat et pas seulement au seulement au seul bénéfice des consommateurs ! Dans son édition du lundi 30 juillet 2012, le quotidien économique « Les échos »rappelle qu’un ancien ministre de l’Intérieur, en 2010, avait déclaré que «l’introduction d’un critère de préférence locale dans le Code des marchés publics est impossible car elle constituerait une méconnaissance des règles communautaires [européennes]», ce que confirme l’un des administrateurs du STIF, Philippe Sainsard, qui explique aussi que « nous ne pouvons pas tenir compte de la localisation d’un prestataire », car les lois européennes et celles de l’OMC ne l’autorisent pas : ainsi la dictature du libre-échange, à travers l’Union européenne et ses institutions politiques et judiciaires, a, avec un tel renoncement, de beaux jours devant elle ! M. Montebourg a beau se battre contre une telle logique de l’abandon social, il me paraît bien isolé au sein d’un gouvernement et d’un Parti socialiste gagnés, l’un et l’autre depuis fort longtemps, par l’idéologie d’un libre-échange mondial (baptisé « mondialisation » pour tant de nos concitoyens) qui se moque bien des protections sociales ou des frontières nationales.

Au regard de cette République si peu protectrice de la France quand, dans le même temps, elle contraint fiscalement de plus en plus les ménages et, surtout, les classes moyennes encore solvables, il est temps de réfléchir au moyen politique institutionnel de remettre l’économique à sa place qui, si elle ne doit évidemment pas être méconnue ou négligée, ne doit jamais être la première dans une société digne de ce nom…

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Non aux délocalisations spéculatives ; oui aux relocalisations productives ! :
Les délocalisations sont devenues, en quelques années, une véritable angoisse pour de nombreux travailleurs qui craignent de voir leur emploi partir à l’étranger pour ne plus revenir, et cette angoisse est encore plus vive depuis 2008 et en cette année 2012, alors que les derniers chiffres de l’emploi annoncent un millier de chômeurs supplémentaires chaque… jour ! Pour de nombreux investisseurs et industriels, ces mêmes délocalisations sont, disent-ils, la seule solution pour rester compétitifs ou pour investir les marchés des puissances émergentes, en particulier l’Inde et la Chine. En fait, dans la plupart des cas, il s’agit d’une implantation dans une zone où le coût de la main-d’œuvre est moins élevé, où l’entreprise produit mais où elle ne vend pas vraiment, destinant ses productions au pays dont elle est issue… Ainsi, par une cruelle ironie du sort, les chômeurs faits par les délocalisations restent les clients des entreprises qui délocalisent pour ensuite vendre moins cher…

Mais, à la suite de Philippe Villemus dans son ouvrage « Délocalisations : aurons-nous encore des emplois demain ? », il faut distinguer les « délocalisations pures » et les « délocalisations de conquête » : les premières sont les plus dangereuses et les plus destructrices, car elles « détruisent directement des emplois, puisqu’elles consistent à fermer ou à réduire une activité pour la transférer à l’étranger » ; les secondes « réalisées pour pénétrer un marché étranger, ne suppriment pas directement des emplois dans le pays d’origine ». Ce dernier type de délocalisations « ne crée pas de nouveaux emplois, mais n’en détruit pas non plus (c’est un manque à gagner en création d’emplois). (…). Le risque est cependant de voir, à terme, cette délocalisation partielle de conquête, parfois indispensable, être suivie du transfert total de la production (ainsi de la Renault Logan, produite en Roumanie, initialement pour les seuls ex-pays de l’Est, et qui est finalement commercialisée aussi en France) ». Cela étant, pour les ouvriers français qui se retrouvent sans emploi, la différence n’est qu’un détail, la triste réalité sociale étant la même dans le pays d’origine de l’entreprise délocalisée pour les salariés concernés.

Au-delà des emplois qui disparaissent ainsi dans notre pays, il y a aussi, non seulement les savoir-faire, parfois transmis de génération en génération au sein de certains secteurs, parfois plus récents (et non moins importants), mais aussi les technologies et les machines-outils qui vont avec, ce qui est d’autant plus dommageable que les pays d’accueil des délocalisations « récupèrent » utilement ces mêmes technologies, au risque de se passer bientôt des entreprises qui les y ont transférées…

D’autre part, pour de nombreuses multinationales « globalisées », les délocalisations ne sont rien d’autre que le meilleur moyen d’utiliser « le vaste monde » et ses potentialités pour satisfaire aux appétits des actionnaires, les vrais maîtres de l’économie financiarisée de Marché. Les travailleurs ne sont, pour eux, qu’une « variable d’ajustement », qu’une masse d’individus interchangeables et utilisables au meilleur coût… Ce n’est évidemment pas l’avis des royalistes qui n’oublient pas l’éminente dignité de chaque homme, quelles que soient ses qualités et ses origines, et qui luttent pour rappeler cette vérité première, au rebours des discours cyniques et sinistres des économistes éclairés qui ne raisonnent qu’en termes de « chiffres » et de « rentabilité »…

Faut-il interdire les délocalisations ? Soyons clairs, dans notre monde globalisé et consumériste, une telle mesure n’aurait aucune efficacité et, même, provoquerait une réaction en chaîne qui affaiblirait encore plus notre pays en le marginalisant sur la scène économique internationale.

Par contre, il est des solutions différentes et sans doute plus efficaces si elles sont soutenues par une véritable volonté politique de l’Etat, par un néocolbertisme industriel intelligent et actif sans être étatiste :

– d’abord, soutenir massivement la Recherche et la Formation pour pouvoir relever le défi des nouvelles donnes économiques et la concurrence des pays étrangers : la « matière grise » est sans doute la plus grande richesse de notre pays, et elle est encore trop négligée malgré les nombreuses qualités et capacités de nos instituts de recherche et de nos grandes écoles, entre autres ;

– ensuite, développer de nouvelles activités liées à la nécessaire politique d’Aménagement du territoire (par le biais, par exemple, du « télé-travail ») et envisager une relocalisation d’activités destinées à une production et consommation de proximité, dans le domaine agricole par exemple ;

– enfin, mettre en valeur ce qui peut attirer des investisseurs étrangers et qui ne peut être, par nature même, délocalisé, comme le patrimoine historique et touristique ; etc.

– Ce ne sont que quelques pistes de réflexion que les royalistes sociaux avancent ici : cet article a vocation, non pas à clore le débat, mais à « ouvrir la boîte à idées », pour que la France ne devienne pas un désert industriel mais trouve de nouvelles forces dans les mutations actuelles dans le respect de son environnement, autant écologique qu’économique et historique…

Jean-Philippe CHAUVIN

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